Fin Avril dernier, Marion Guibert, a pris le poste de chargée de mission du contrat de restauration. Un beau challenge pour cette passionnée de l’eau et des milieux aquatiques, qui a le sens de la concertation et la ténacité indispensable au pilotage des projets complexes et multi-acteurs. Rencontre.
Quel est votre parcours professionnel ?
Après un master 2 en gestion de l’eau et des milieux aquatiques, j’ai commencé ma carrière à la Région Limousin, où j’instruisais des dossiers de financement de programmes de restauration. Très vite, j’ai eu envie de piloter des projets sur le terrain. J’ai donc rejoint la communauté de communes du Pays d’Amplepuis Thizy dans le Rhône pour créer un syndicat de rivière, le SYRRTA, et mettre en œuvre un contrat de rivière qui portait principalement sur la restauration de continuités écologiques et la valorisation de zones humides forestières. J’ai dirigé ce Syndicat pendant 8 ans, préparé un nouveau contrat et j’ai eu envie de me réinvestir dans de nouveaux projets. Le poste de chargée de mission Rhône de Miribel Jonage est arrivé à point nommé, il correspondait parfaitement à mes attentes : des enjeux forts, de nombreux partenaires, un montage original, le tout sur un territoire périurbain, passionnant, où il était attendu un regard neuf, de l’énergie et une approche renouvelée pour coordonner la restauration du canal de Miribel.
5 mois après votre arrivée, quels sont selon vous les enjeux de la mise en oeuvre du programme de restauration du Rhône à Miribel Jonage ?
Par rapport à mes perceptions initiales, j’en ai identifié deux principaux qui vont éclairer la conduite du dossier. Le premier est l’ampleur du chemin à accomplir pour que la représentation du canal de Miribel évolue. Pour beaucoup, ce canal est un « objet » aménagé, qui a dans le passé rempli des fonctions, mais qui aujourd’hui n’est pas perçu comme un milieu naturel. Or toute l’ambition de la restauration est de faire renaître ici le fleuve Rhône, de lui redonner un fonctionnement plus naturel, de ramener de la vie, de la biodiversité, mais aussi de recréer du lien avec les communes riveraines et les usagers du Grand Parc. Il faut donc accompagner ce changement de représentation, déjouer les craintes, répondre aux interrogations, pour que les effets positifs attendus soient compris, partagés, appropriés et que tous les acteurs travaillent dans la même perspective.
Le second enjeu concerne l’eau potable, qui est une des quatre vocations du Grand Parc. C’est un vrai défi de concilier la préservation de cette ressource, avec d’autres enjeux, sans opérer de hiérarchisation. Cela signifie, bien sûr, que l’on ne peut pas jouer aux apprentis sorciers et les impacts de chaque action sur cette ressource doivent être finement analysés. Mais il faut aussi démontrer que la restauration des milieux aquatiques est un levier pour protéger durablement la ressource en eau potable. C’est un équilibre subtil, qui sera atteint progressivement, au fur et à mesure des réalisations.
Quelles sont vos priorités pour l’année qui s’ouvre ?
Elles sont dans la droite ligne des enjeux évoqués. Les études de maitrise d’œuvre sont engagées sur le canal de Miribel, avec l’objectif de disposer d’un avant-projet à l’horizon 2020. D’ici là, il faut privilégier la concertation et l’écoute de tous, élus, habitants, usagers pour leur faire imaginer ce que cette reconquête du fleuve peut apporter. L’entrée « écologique » ne doit pas être la seule, il faut travailler sur le rapport au fleuve, sur l’envie des habitants de retrouver des liens avec la nature et l’eau, de pouvoir accéder aux berges du canal. Tous ces échanges viendront alimenter le projet de l’Anneau Bleu, que les collectivités réaliseront, une fois la restauration du canal terminée. Cette dynamique exige beaucoup de coordination avec les trois maitres d’ouvrages de la restauration du canal et leur maitre d’œuvre pour garantir la cohérence du projet et tenir les délais dans une période qui va être contrainte par les élections.
L’autre opération majeure est le suivi de l’expérimentation de la lône de Jonage. Nous avons remis en eau 1,5 km de lône en avril dernier et les milieux humides recréés se sont développés beaucoup plus rapidement que prévu. C’est positif mais, là encore, il faut accompagner ce changement, auprès des usagers de ce secteur, les VTTistes, les agriculteurs, les promeneurs, qui voient le paysage et leurs pratiques de cet espace bouleversés. L’autre objectif est de fixer les modalités de poursuite de l’expérimentation. Nous disposerons d’un premier bilan prochainement et engagerons les discussions avec nos partenaires, en tenant compte des potentiels effets sur la nappe souterraine. En parallèle, il nous faudra commencer à réfléchir au futur contrat, car les projets en cours ne sont qu’une première étape. La restauration du Rhône à Miribel Jonage est un projet de longue haleine !